91ème parallèle

  • 59 février

    59 février

    Je m’imprègne de l’idée du départ et de toute ma colère. Je m’imprègne de ma colère, de toute ma colère. L’intérieur de mon crâne me démange. On ne peut pas se gratter l’intérieur du crâne. Tout le dedans de mon crâne me démange, c’est la colère et je ne peux pas y mettre un doigt.…

  • 57 février

    57 février

    Je me suis éveillée ce matin dans la lumière d’un hiver vieilli, ses tempes un peu grises. La tournure de ce printemps m’inquiète décidément. Ici les gens font comme s’ils ne s’apercevaient de rien, mais je vois bien que l’homme aux tisanes mesure le rayonnement solaire d’un air inquiet.  Ça ne me dit rien qui…

  • 56 février

    56 février

    Plus que quelques jours et nous partons. L’homme aux tisanes m’apprend à préparer la fumache. Avec l’expérience, je peux la boire et garder un peu ma tête près de moi. Je me retrouve sous le feuillage, comme aux premiers temps avec la dame au tailleur blanc. Je cherche toujours, j’ai déjà trouvé beaucoup de choses. …

  • 55 février

    55 février

    Je continue d’avancer à l’intérieur de mon propre rêve. Il est tapissé de tentures baroques. Au bout du couloir, un portrait de Bach. La musique m’aide. Je me défais de la perte de toi. Je regarde mes jambes de femme. Je te garde dans mon nouveau corps. Je rêve d’un livre aux marches qui tournent,…

  • 53 février

    53 février

    Pendant que les jours passent, la lumière continue à baisser. Alors qu’à cette époque, habituellement, elle monte. Quelque chose pourrit à l’intérieur du printemps, ou c’est moi qui voit mal ? Dans mon rêve une bête sale, poisseuse, à écailles vert sombre, dévorait une boule qui ressemblait à la planète où nous habitons. Ici les…

  • 52 février

    52 février

    Dans la fumache je trouve chaque jour de nouveaux liens. L’homme qui la prépare est aussi capable d’accompagner les rêves. Souvent, il soutient mon sommeil, prend des précautions pour les têtes emportées. Peu à peu quelque chose se précise. Au début c’était seulement une silhouette dans la brume. Ta silhouette. La mienne. On ne sait. …

  • 51 février

    51 février

    Au réveil dans ma tête tourne la phrase ombres bleues des blessures de foule, une vision d’orage. La fumache me donne de nouvelles façons de voir, dans la veille et dans le sommeil. C’est un peu comme si ma vie se réécrivait, ou plutôt, des liens se défont et de nouveaux s’établissent, tout paraît souple…

  • 50 février

    50 février

    Il y a parmi nous un homme, petit et maigre avec une figure toute aiguisée : la face allongée, le nez fin, très dessiné, avec des lunettes rondes, la bouche mince mais aimable, le sourire étonnamment bienveillant pour un visage si pointu. Il ne se transforme pas en oiseau la nuit venue, il ne fait…

  • 49 février

    49 février

    La lumière baisse un peu chaque jour.  Mon compagnon rejoint les autres vautours chaque nuit.  J’attends que se clarifient les contours de ta disparition. Les frontières de ma perte.  J’essaie quelque chose. J’essaie une vie, en quelque sorte. Je me frotte, je lutte en hérisson. Le réel résiste, j’ai du mal à penser. Un monde…

  • 48 février

    48 février

    Peut-on photographier les fleurs la nuit ? Nous vivons un printemps noir et blanc, baigné de Lune ou d’un soleil vertical qui ne laisse aucune place aux couleurs. Ça se voit sur les arbres, dont le feuillage reste gris toute la journée.  Depuis que je suis ici, j’ai compris, peu à peu. J’ai perdu quelque…