91ème parallèle

  • 39 décembre

    39 décembre

    J’ai une épaule de femme aussi ! C’est la souris qui s’en est aperçue. Elle me léchait et s’est mise à pousser des petits piaillements à peine audibles, comme un poussin encore dans l’œuf. Une belle épaule de femme. Une seule. Et des polognes sans enluminures, mes hivers et mon corps batterie vide, je voulais…

  • 37 décembre

    37 décembre

    J’essaie de ne pas me nourrir seulement de souvenirs. J’essaie de manger aussi des promenades de ciel hivernal. Je sors. La souris dans ma poche. Mes jambes de femme, les chaussures de femme que j’ai achetées en solde au magasin du centre. Je sors. Je marche et le soleil frotte ses rayons sur la ville,…

  • 36 décembre

    36 décembre

    Une fatigue boueuse que pique le matin, et ça saigne. J’ai rêvé d’un exil. Des vagues hautes et derrière, le monde invisible.  Nous ne savions pas pourquoi nous partions. Tu disais pour toujours, j’en doutais. Tout était précipité, même la mer.

  • 35 décembre

    35 décembre

    On avait inventé des animaux synthétiques, des soleils électriques et des pensées artificielles. Je ne savais rien du paradis, mais là, là, on est  tout seul, là on est tout seul, là où avant on n’était pas là, là où bientôt on n’y sera plus non plus. Au moins dans le visible. Seule la souris…

  • 34 décembre

    34 décembre

    Qui aurait pu prédire que nous aurions besoin, pour vivre, de silhouettes d’arbres et de grandes maisonnées. Tu livrais bataille aux merles, chantais avec les cormorans, imitais la pie qui saute. Je t’attendais sans criailler.  C’était heureux. Je ne comprends toujours pas ta disparition. 

  • 33 décembre

    33 décembre

    Ce serait un matin de nouveau monde. Tu poserais ta main, quelque chose de doux. La lumière percerait la toile humide du ciel, une blancheur tiède et moelleuse, et qui dure. On lécherait des gouttes sur la crête aiguë d’un nuage. Toute la journée, ce jaune auquel le soleil se pend. Et la nuit tomberait…

  • 32 décembre

    32 décembre

    On marchait sur la plage, on s’asseyait sur le sable, on regardait l’horizon, on se passait la main sur la joue pour relever une mèche de cheveux, on faisait ces choses automatiques que font les gens sur les bordures de mer. On marchait on sentait ses chaussures s’effacer dans le sable en y laissant leurs…

  • 61 novembre

    61 novembre

    Je compte. Je compte les pas de la souris entre son trou et le pied de l’armoire où elle disparaît. Je compte les mouches sur l’abat-jour quand il fait chaud et que la nuit entre. Je compte dans ma tête mes battements de cœur. Je compte les voitures qui passent dans la rue, à l’oreille,…

  • 60 novembre

    60 novembre

    Je dors je fais un rêve. Je dors après n’avoir pas dormi. Je fais un rêve. Avant le rêve j’ai consacré des minutes à ne pas dormir. Je ne sais pas si mes yeux sont ouverts ou fermés quand je ne dors pas la nuit dans le noir. Je ne dors pas je ne sais…

  • 59 novembre

    59 novembre

    On marchait. On s’étonnait de presque rien. On suivait le sentier dans la nuit pleine, on avait nos yeux qui brillaient de lumière de lune. On parlait. On mangeait un peu d’air au passage en parlant, qui s’engouffrait dans nos bouches. On avait chacun ses jambes. On marchait chacun avec ses jambes. On tenait ses…