91ème parallèle

  • 36 novembre

    36 novembre

    C’était le temps des âges, des macérations de plantes mortes, un truc pour présumer de ses forces, on faisait de longues promenades, marcher aux nuisibles, prendre une petite inspiration et souffler la vapeur de nos bouches, regarder sous la nuit la lueur peureuse d’une Lune presque pleine qui s’appuie sur les champs, humer les herbes…

  • 35 novembre

    35 novembre

    Ce qu’il fallait de fatigues. Ce qu’il fallait de risques pris, à verre mesurés. Ce qu’il fallait de paroles pesées, de hautes lumières dans les ciels rougeauds du soir. Si le froid gelait les organes, les intérieurs des corps – nous donnerait des morts instantanées. On était debout au pied de nos colères, et regardant…

  • 34 novembre

    34 novembre

    C’était le temps des fatigues sans bordures. On cherchait le repos, on allait voir les grands doigts noirs des arbres, le ciel qui ployait dessus. On marchait sous la canopée, on aurait pareillement volé la terre. Tu tenais ma main contre toi comme un animal chaud et doux, et je voyais pousser des armures au…

  • 33 novembre

    33 novembre

    La tête comme ça pleine de petites pierres comme de petites phrases jetées dans un panier. Des petites phrases qui ne servent plus pour la parole, plutôt pour décorer un pot, une plante. Maintenant que les choses changent. Maintenant que je m’aperçois que les choses changent. Ont changé, les choses.  C’est une peine qui peut…

  • 31 novembre

    31 novembre

    Ça tient le temps, de réparer les effondrements. Mais ça ne tient pas les nostalgies à distance, les peines. J’aurais mieux voulu pouvoir te dire On fera vieux feux de nos os longs, on dormira jusqu’à récupérer toutes les fatigues perdues, mais t’es partie, ta disparition a fait taire ces phrases-là, et maintenant je dois…

  • 61 octobre

    61 octobre

    Autoportrait au robinet, préparatifs pour la bataille avec le monde. Ma peau fait son office de peau. Elle me tient. Comme un sac elle me tient ensemble dans elle. Malgré les choses qu’on ne sait pas à mon sujet, j’ai une peau qui me tient ensemble. Je porte le nom de la seule famille à…

  • 60 octobre

    60 octobre

    A l’origine on était deux visages.  A l’origine on était des bandes de mots sans force et vides de sens, des visages dessinés de force par la langue, mais qui ne voulaient rien dire encore, que personne ne reconnaissait, personne ne voyait ne pouvait toucher ou dire, Ah tiens, c’est icelui. Des visages sans réponse,…

  • 59 octobre

    59 octobre

    Aujourd’hui autre chose est venu. Je me suis regardé dans la glace, c’était juste un reflet de fenêtre, et j’y ai vu ton visage. Ton regard gris terne comme un mort, Ah mais tu n’es pas un mort, tu es la femme que j’ai aimée, tu es de ma jambe, ta-jambe-ma jambe-ton-visage-mon-visage, on est emmêlées…

  • 58 octobre

    58 octobre

    On avance par train. La campagne : bleuie, goût de ville, avec parfois une amertume sur la fin.  Dans la nuit du train, dans la nuit de la campagne, j’ai vu, enfin mon visage. Une sorte de mon visage, une espèce de ma figure, ou quelque chose comme. Comme l’ombre de mes traits. Changés.  Quelque…

  • 56 octobre

    56 octobre

    Je suis parti dans une zone. J’aime marcher dans cette zone, retrouver les carrelages-peints baroques des brasseries des centres commerciaux, leurs masques et leurs monstres secrets. Un paysage désamianté, sans extraordinaire, seulement des grands panneaux publicitaires, quelque chose qu’on dirait laid, crasseux, mais qui me laisse tranquille rêvassant.  Je suis parti avec la souris. C’est…