40 avril

Je suis une personne. Je suis un être humain avec une histoire. J’ai des souvenirs, une mémoire. Comme tout le monde je cours sur le petit point du présent, minuscule petit point du présent.

Ce qui se passe dans le présent est tellement fort que ça efface tout. Ça va peu à peu mais vite. Dans le présent. Le présent appuie. On se tient sur le petit point du présent, on court et ça file vers le bout, vers la fin. Tout droit. 

La personne que je suis a un entourage. Des amis avec qui vivre ça, la fin. Je ne savais pas, en arrivant ici, que nous vivrions ensemble la dernière semaine. Chaque jour nous comprenons un peu plus. C’est terrifiant et calme. Pour dire l’écroulement.

On arrive encore à faire des repas ensemble. Je ne sais pas combien de temps nous aurons des vivres. Ensuite ça ira vite, toujours sur le très petit point du présent. On court, on tient. On saute du petit point, on saute à côté, on ne court plus, on est mort, mort du présent et mort tout court. Ça ne bouge plus.

Toi d’aujourd’hui se regarde dans tes amies comme au miroir des années, glace sans tain sans figure sans fard. Heureusement qu’elles sont là.